Sheikh Mohammad Ali Ferkous
Question : Quel est le jugement concernant un homme marié avec deux femmes et qui n’assure pas l’équité entre elles ?
Réponse : Louange à Allâh, Maître des Mondes ; et paix et salut sur celui qu’Allâh عزّ وجلّ a envoyé en miséricorde pour le monde entier, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection. Cela dit : Si la femme a une coépouse, il sera du devoir du mari de faire preuve d’impartialité dans la manière d’agir et les dépenses en général : la nourriture, la boisson, les vêtements, le logement et le partage du séjour.
Il ne lui est pas permis d’être injuste ou inéquitable ; Allâh عزّ وجلّ dit :
﴿فَإِنْ خِفْتُمْ أَلاَّ تَعْدِلُواْ فَوَاحِدَةً أَوْ مَا مَلَكَتْ أَيْمَانُكُمْ ذَلِكَ أَدْنَى أَلاَّ تَعُولُوا﴾ [النساء: 3].
Sens du verset :
﴾…mais, si vous craignez de ne pas être justes avec celles-ci, alors une seule, ou des esclaves que vous possédez. Cela afin de ne pas faire d’injustice (ou afin de ne pas aggraver votre charge de famille)﴿ [s. An-Nişâ’ (les Femmes) : v. 3]
Le Prophète صلى اللهُ عليه وآله وسَلَّم dit : « Quiconque ayant deux épouses et penche pour l’une d’entre elles et ne fait pas preuve d’impartialité, viendra le Jour de la Résurrection avec un côté de son corps penché.»(1)
Ce hadith constitue une preuve sur l’illicéité de favoriser une épouse par rapport à l’autre dans les droits conjugaux dont le mari est capable d’en maîtriser, que ces femmes soient musulmanes, ou l’une est musulmane et l’autre est issue des Gens du Livre, et ce, sans divergence et fait l’unanimité des savants. Ibn Al-Moundhir رحمه الله a dit : « Les savants sont unanimes pour dire que la répartition doit se faire équitablement entre une épouse musulmane et une autre issue des Gens du Livre. »(2)
Encore, Le Prophète صلى اللهُ عليه وآله وسَلَّم a recommandé de ménager les femmes en disant : « Le meilleur d’entre vous est celui qui le mieux ménage son épouse, et moi est celui qui ménage le mieux ses épouses. »(3)
En outre, comme le mari doit être équitable, il doit aussi se comporter convenablement et être bienfaisant envers elles ; ce sens est inclus dans le verset où Allâh عزّ وجلّ dit :
﴿إِنَّ اللهَ يَأْمُرُ بِالْعَدْلِ وَالإِحْسَانِ﴾ [النحل: 90]
Sens du verset :
﴾Certes, Allâh commande l’équité, la bienfaisance﴿ [s. An-Nahl (les Abeilles) : v. 90]
﴿وَعَاشِرُوهُنَّ بِالْمَعْرُوفِ﴾ [النساء: 19].
Sens du verset :
﴾Et comportez-vous convenablement envers elles﴿ [An-Nişâ’ (les Femmes) : v. 19] En effet, ceci est parmi les droits de l’épouse sur son époux.
Sur ce, Il fait partie de l’équité le partage les nuits entre les épouses, et ce malgré qu’il n’y eut pas de rapport conjugal car il n’est pas obligatoire d’être équitable en ce qui concerne les rapports intimes, et ceci fait l’objet d’un consensus entre les oulémas(4).
En effet, ce qui mène aux rapports intimes sont le désir charnel, l’amour et le penchant. il est impossible de traiter ses femmes sur le pied d’égalité, vu que le mari penche nécessairement pour l’une d’elles ; pour cette raison, le Prophète صلى اللهُ عليه وآله وسَلَّم répondit lorsqu’on lui posa la question sur la personne qu’il aimait le plus : « C’est ‘Âicha.»(5)
En effet, il convient de rappeler qu’il n’est pas obligatoire à l’époux d’être équitable envers ses épouses dans les dépenses et l’habillement, s’il accomplit son devoir et ses responsabilités envers chacune d’elles. Il lui appartient de favoriser une par rapport à l’autre dans les dépenses et l’habillement si cette dernière est suffisamment nantie, car il est difficile d’être équitable dans tout cela. Si on lui ordonne de faire preuve d’équité dans les dépenses et l’habillement, cela n’est réalisable pour lui qu’avec un surplus de gêne. Ainsi, l’obligation d’être équitable dans les dépenses devient ainsi caduque, comme dans les rapports conjugaux(6).
Comme il n’est pas obligatoire à l’époux d’être équitable envers ses épouses dans la dot et la walîma (banquet festif). Il est plutôt permis d’y faire une différence. Cela est prouvé par le hadith de Oum Habîba que « le Messager d’Allâh صَلَّى اللهُ عَلَيْهِ وَسَلَّمَ s’est marié avec elle alors qu’elle était en terre d’Abyssinie. C’était An-Nadjâchî [Négus] qu’il l’a marié en lui accordant une dot de quatre mille dirhams [d’argent] et des provisions de sa part. An-Nadjâchî l’envoya avec Chourahbîl ibn Haşana et le Messager d’Allâh صلَّى الله عليه وسلَّم ne lui envoya rien. La dot de ses femmes était de quatre mille dirhams »(7)
Anas رضي الله عنه a dit à propos du mariage de Zaynab bint Djahch رضي الله عنها : « Le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم n’a jamais fait un banquet pour l’une de ses femmes, excepté [Zaynab] : il fêta son mariage en égorgeant une bête. »(8)
En effet, chaque épouse doit avoir une maison propre à elle où son mari pourrait y venir, comme faisait le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم avec ses femmes, vu la Parole d’Allâh – qu’Il soit Très-Haut – :
﴿يَا أَيُّهَا الَّذِينَ آمَنُوا لَا تَدْخُلُوا بُيُوتَ النَّبِيِّ إِلَّا أَنْ يُؤْذَنَ لَكُمْ﴾
﴾Ô vous qui croyez ! N’entrez pas dans les demeures du Prophète, à moins qu’invitation ne vous soit faite﴿ [s. Al-Ahzâb (les Coalisés) : v. 53]
Le sens apparent de ce verset montre que le Prophète صلَّى الله عليه وسلَّم accordait à ses épouses plusieurs maisons autonomes où il partageait ses nuits entre elles. Il ne fait aucun doute que cela est plus à même de les protéger et de les couvrir afin qu’elles ne sortent pas(9). L’époux ne doit pas mettre ensemble plus d’une femme dans une seule maison, car cela s’oppose au fondement susmentionné, à moins que cette femme en soit satisfaite. Cette maison doit être semblable à celui de ses coépouses, convenable et ne présente aucun dommage ou préjudice.
Le savoir parfait appartient à Allâh عزّ وجلّ, et notre dernière invocation est qu’Allâh, Seigneur des Mondes, soit Loué et que paix et salut soient sur notre Prophète Mohammed, ainsi que sur sa Famille, ses Compagnons et ses Frères jusqu’au Jour de la Résurrection.
Source : Ferkous.com
(1) Rapporté par : Ahmad (7936) et cette version lui appartient, Aboû Dâwoûd (2135), Ibn Mâdjah (2045) et An-Naşâ’î (3942), d’après Aboû Hourayra رضي الله عنه. Ce hadith est jugé sahîh (authentique) par Al-Albâni dans Irwâ’ Al-Ghalîl (7/80) (n° 2017).
(2) Cf. : Al-Idjmâ‘ d’Ibn Al-Moundhir, un cas exceptionnel de cette répartition consiste à demeurer, après s’être remarié avec une nouvelle femme vierge, sept nuits [par rapport à sa] coépouse déjà mariée. Et s’il se remarie avec une nouvelle femme qui est déjà mariée, alors qu’il s’est déjà marié avec une femme vierge, il reste chez la première trois nuits. Ensuite il partage ses nuits à chacune de ses femmes, vu le hadith de Anas ibn Mâlik رضي الله عنه qui a dit : « Il fait partie de la sounna que si l’homme se remarie avec une femme vierge sur une femme déjà mariée, il demeure chez la première sept nuits, et s’il se remarie avec une femme déjà mariée, alors qu’il a une femme qui était vierge, il demeure chez la première trois nuits. » [Rapporté par : Al-Boukhârî (5214) et Mouslim (1461)]
(3) Rapporté par : At-Tirmidhî (4269), Ad-Dârimî (2315) et Al-Bayhaqî (16117), d’après ‘Âîcha رضي الله عنها, et par Ibn Mâdjah (2053), d’après Ibn ‘Abbâsرضي الله عنهما . Ce hadith est jugé sahîh (authentique) par Al-Albâni dans Sahîh Al-Djâmi‘ (3314), As-Silsila As-Sahîha (285) et Âdâb Az-Zifâf (197).
(4) Cf. : Al-Moughnî d’Ibn Qoudâma (9/618).
(5) Rapporté par : Al-Boukhârî (3662) et Mouslim (6328), d’après ‘Amr ibn Al-‘Âs رضي الله عنهما.
(6) Cf. : Al-Moughnî d’Ibn Qoudâma (7/32).
(7) Rapporté par : Aboû Dâwoûd (2107) et An-Naşâ’î (3350), d’après Oum Habîba bint Abî Soufyân رضي الله عنهما. Cf. : Sahîh Abî Dâwoûd d’Al-Albânî (1835).
(8) Rapporté par : Al-Boukhârî (5171) et Mouslim (1428), d’après Anas ibn Mâlik رضي الله عنه.
(9) Cf. : Al-Moughnî d’Ibn Qoudâma (7/34).